Celle-là, on ne risque pas de l’apprendre à l’école ! LA FONTAINE

LA MINUTE POETIQUE

Excellent, quelle leçon !

Ce La fontaine, quel observateur, quel poète, quel psychologue … Les siècles ont passé sur l’humain sans le changer ! La morale ? Ne sert à rien apparemment, pas assez lu par nos énarques : elle n’est pas au programme !

Etonnant ce que cette fable vieille de quatre siècles est aujourd’hui d’actualité !

Lisez  attentivement cette fable, peu connue  

 Elle doit  dater de 1671.

 Un sacré  visionnaire, ce Jean de la Fontaine  !

 LE CHIEN ET LES CHACALS  

 JAMAIS APPRISE A L’ECOLE .

 

 Du coquin que l’on choie, il faut  craindre les tours

 

 Et ne  point espérer de caresse en  retour

 Pour l’avoir ignoré,  maints nigauds en pâtirent.

 C’est ce dont je  désire, lecteur, t’entretenir.

 

 Après dix ans  et plus d’homériques  batailles,

 de méchants pugilats, d’incessantes  chamailles,

 Un chien était bien aise d’avoir signé la  paix

 avec son voisin, chacal fort  éclopé

 Qui n’avait plus  qu’un œil, chassieux de  surcroît,

 Et dont l’odeur, partout,  de loin le précédait.

 

Voulant sceller  l’événement

 et le célébrer  dignement,

 Le chien se donna grande  peine

 Pour se montrer doux et  amène.

 Il pria le galeux chez lui,

 le fit  entrer, referma l’huis,

 L’assit dans un  moelleux velours

 Et lui tint ce pieux  discours :

 « Or donc, Seigneur Chacal, vous  êtes ici chez vous !

 Profitez, dégustez,  sachez combien je voue

 D’amour à la  concorde nouvelle entre nous !

 Hélas, que j’ai  de torts envers vous et les  vôtres,

 Et comme je voudrais que le passé fût  autre !

 Reprenez de ce rôt, goûtez à tous les  mets,

 Ne laissez un iota de ce que vous  aimez ! »

 

 L’interpellé eut  très à cœur

 D’obéir à tant de  candeur.

 La gueule entière à son  affaire,

  il fit de chaque plat  désert

 Cependant que son hôte  affable

 Se bornait à garnir la  table.

 Puis, tout d’humilité et la  mine contrite,

 En parfait comédien,  en fieffée chattemite,

 il dit : «Mais,  j’y songe,  mon cher,

 Nous voici  faisant bonne chère

 Quand je sais là,  dehors, ma pauvrette famille :

 Mes épouses, mes  fils, mes neveux et mes filles,

 Mes oncles et  mes tantes que ronge la  disette,

Toute ma  parentèle tant nue que  maigrelette.

 Allons-nous  les laisser jeûner  jusqu’au matin ?  »

 “Certes non ! »  répliqua, prodigue, le mâtin,

 Qui se leva,  ouvrit, et devant qui passèrent

 Quarante et un  chacals parmi les moins  sincères.

 Sans tarder cliquetèrent les  prestes mandibules

 Des grands  et des menus, même des  minuscules.

 Ils avaient tant de  crocs, de rage et d’appétit,

 Ils mangèrent  si bien que petit à petit

 Les vivres s’étrécirent comme  peau de chagrin

 Jusqu’à ce qu’à la fin il  n’en restât  plus rien.

 

 Ce que  voyant, l’ingrat  bondit :

 « Ah ça, compère, je  vous prédis

 Que si point ne nous  nourrissez

 Et tout affamés nous  laissez

 tandis que vous allez  repu,

 La trêve entre nous est rompue !»

 

 Ayant alors, quoi qu’il eût  dit,

 Retrouvé forces et  furie,

 Il se jeta sur son  mécène,

 Et en une  attaque soudaine

 il lui  récura la toison,

 Aidé de  toute sa maison.

 Puis, le  voyant à demi-mort,

 De chez lui il le  bouta hors.

 Et  l’infortuné  crie encore

 «La peste  soit de mon cœur  d’or !  »

 

 Retenez la  leçon, peuples trop accueillants  :

 À la gent  famélique, point ne devez  promettre.

 Ces êtres arriérés,  assassins et  pillards

 marchent  en rangs serrés sous le vert  étendard.

 Vous en invitez un,  l’emplissez  d’ortolans,

 Et  c’est  jusqu’à vos  clefs qu’il vous  faut lui remettre.

                                                                                                     Jean de LA  FONTAINE

 

                         1671 ce n’est pas d’hier !   Toute allusion avec quelques événements que se soient ne serait que pure coïncidence ! 

 

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